Pour caractériser ces échanges, une méthodologie adaptée a été déployée à chaque échelle spatiale : télédétection, piézométrie, pompages d’essai et débitmétrie, traçage artificiel, traçage naturel de l’eau (température, signature isotopique de l’eau, ions majeurs, carbone organique dissous et gaz dissous). Coupler ces différentes méthodes scientifiques de caractérisation des échanges entre nappe et rivière, sur le système Loire-nappe-Loiret, permet de développer une approche innovante et intégrée, dans la description multi-échelle des échanges nappe-rivière. Les verrous scientifiques identifiés portent sur les variations spatiales et temporelles des flux d’eau aux interfaces eaux de surface-eaux souterraines, ainsi que sur leur quantification.
Ce projet vise à confronter ces différentes méthodes, sur une partie du linéaire du Loiret où les échanges nappe/rivière sont très importants (Binet et al., 2017 ; Lalot et al., 2015). La complémentarité des résultats, liés aux différentes méthodologies utilisées, nous permet de comprendre les échanges (et les mélanges) dans toute leur complexité spatiale (de la source à la confluence Loire-Loiret) et temporelle (au cours des crues et des périodes d’étiage).
Le Loiret est principalement alimenté par des résurgences d’eau souterraine provenant des pertes de la Loire ayant circulé dans la formation karstifiée des calcaires de Beauce. Il reçoit également les eaux de surface de différents affluents (Dhuy, bras de Bou, bras des Montées et bras du Couasnon).
Variabilité spatio-temporelle de la chimie des eaux (BRGM/RP-72897-FR)
Quatre campagnes de prélèvements et de mesures physico-chimiques ont été réalisées dans le Val d’Orléans, entre sept. 2020 et juin 2023 dans des conditions hydrologiques contrastées (crue et étiage).
Elles se sont déroulées selon 2 approches spatiales le long du linéaire du Loiret :
1) des prélèvements ponctuels pour l’analyse de paramètres géochimiques spécifiques (stables de l’eau, isotopes du Sr, éléments majeurs…)
2) des mesures physico-chimiques en continu via des capteurs embarqués permettant d’identifier les paramètres les plus sensibles aux arrivées d’eau souterraine.
L’étude de la variabilité spatiale de la composition géochimique des eaux du Loiret a permis
i) d’identifier les lieux d’échanges eau de surface/eau souterraine du Val d’Orléans
ii) de mettre en évidence la pertinence de traceurs dans la caractérisation des échanges nappe-rivière.
La signature géochimique des eaux du Loiret est fonction de plusieurs processus géochimiques dont l’apport d’eau souterraine mais également d’autres processus (apports des affluents et modification des équilibres calco-carboniques liés à la photosynthèse) qui impactent la composition géochimique des eaux et doivent être pris en compte. Les paramètres tels que le pH, la conductivité électrique, l’oxygène dissous montrent des variations contrastées sur le profil en long du Loiret. Ainsi, ils se sont révélés être de bons indicateurs des résurgences d’eau souterraine dans le Loiret. A l’inverse, les phosphates, la chlorophylle a, la turbidité se sont révélés peu pertinents pour la caractérisation des échanges nappe – rivière.
Les modalités de mesures à haute fréquence spatiale des paramètres physico-chimiques mettent en évidence
i) l’importance d’un pas de temps de mesure très fin (une à deux secondes)
ii) la nécessité de réaliser les mesures à profondeur(s) constante(s).
Les isotopes de l’eau mettent en évidence des apports souterrains au Loiret tout au long du profil. Leur suivi à haute fréquence en période de crue et de décrue a permis de distinguer la contribution directe des eaux de la Loire, des eaux ayant séjourné longtemps dans la l’aquifère et des eaux de la recharge pluviale.
Morphologie karstique en rivière (BRGM/RP-72898-FR)
La variation des paramètres physico-chimiques/géochimiques le long du Loiret permet de situer les sources qui fonctionnent en émergences mais ne permettent pas d’identifier les sources fonctionnant en pertes alors que le Val d’Orléans est connu pour avoir un fonctionnement en inversac (Albéric, 2004).
L’acquisition de données topographiques et bathymétriques dans la Loire et dans le Loiret a permis de localiser des zones de pertes et/ou sources, témoin de ces échanges eau de surface/eau souterraine.
Une nouvelle méthode d’acquisition avec un échosondeur multifaisceaux porté par un catamaran radiocommandé a été testé sur le Loiret (bassin des Tacreniers) et a permis de localiser des zones de dépression recouvertes de végétation aquatique.
- Localisation des zones de dépression dans le bassin des Tacreniers
On peut supposer que les plantes tirent un bénéfice de se situer au droit des dépressions identifiées : lien fortuit, ancrage dans la roche ou apport de nutriments des dépressions émissives ? Une technique d’imagerie thermique a été mise en œuvre et se révèle très prometteuse quant à la localisation d’émergence karstique plus chaude que l’eau du Loiret.
Propriétés hydrodynamiques de la nappe des alluvions (BRGM/RP-72899-FR)
Le Loiret est une résurgence karstique bien connue (source du Bouillon et de l’Abîme) de l’aquifère des calcaires de Beauce. Il est alimenté par plusieurs sources (Béchets, Clouseau, Saint-Nicolas, Pie, etc.) tout au long de son cours.
Cependant le rôle de la nappe des alluvions dans les interactions nappe/rivière est très peu connu.
Des investigations hydrogéologiques ont été menées afin de développer les connaissances sur le Loiret et la nappe des alluvions ou des calcaires de Beauce.
Des expériences de terrain, qui n’avaient jusqu’alors jamais été conduites sur ce secteur d’étude (aval du Loiret, commune de Saint-Pryvé-Saint-Mesmin), ont eu pour objectif d’évaluer les propriétés de l’aquifère des alluvions, à l’affleurement aux abords du Loiret.
Trois expériences de terrain ont été menées :
1) caractérisation des propriétés hydrodynamiques de la nappe alluviale,
2) caractérisation des propriétés hydrodispersives du milieu souterrain,
3) suivi en pression et température des eaux de surface et des eaux souterraines sur une période de 2 ans.
Les propriétés hydrodynamiques (transmissivité 1,2 à 1,6x10-3 m2/s, coefficient d’emmagasinement 2,1x10-3) ont, pour la première fois, été déduites à l’aide des pompages d’essai (pré-test, essai de puits , essai de nappe) au droit de l’aquifère capté. Le coefficient d’emmagasinement est faible (environ 2,8 pour mille) compte tenu du mode de gisement supposé des alluvions (nappe libre).
- Interprétation de l’essai de nappe : calages retenus avec la méthode de Theis (courbes roses), en haut échelle arithmétique, en bas échelle semi-logarithmique (logiciel OUAIP ouaip.brgm.fr)
L’essai de traçage a permis de déterminer une porosité cinématique de l’ordre de 2,3 % et une dispersivité de l’ordre de 0,38 m. La vitesse maximale est de 22 m/j et la vitesse moyenne de 11 m/j dans ces conditions de gradients forcés.
- Interprétation des données de traçage (corrigées du bruit de fond) avec un modèle d’écoulement radial convergent (logiciel TRAC : trac.brgm.fr)
Le suivi piézométrique de la nappe montre que le Loiret semble être systématiquement à l’origine des variations qu’elle subit. L’écoulement apparaît ainsi s’établir dans le sens Loiret - nappe. Il existe un déphasage entre les eaux souterraines et les eaux de surface, de l’ordre de quelques heures à 48 heures tout au plus.
Pour en savoir plus :
Résumé de la présentation de l’estimation des caractéristiques hydrodispersives de la nappe des alluvions dans le Loiret (BRGM,Orléans, France ; CETRAHE, Université d’Orléans, France ; ISTO, Université d’Orléans, France) à la 9e conférence internationale sur les traceurs et les méthodes de traçage
Présentation de l’estimation des caractéristiques hydrodispersives de la nappe des alluvions dans le Loiret (BRGM,Orléans, France ; CETRAHE, Université d’Orléans, France ; ISTO, Université d’Orléans, France) à la 9e conférence internationale sur les traceurs et les méthodes de traçage
- Présentation sur l’estimation des caractéristiques hydrodispersives de la nappe des alluvions dans le Loiret
Présentation des tests de traçages en hydrogéologie et exemples d’application à la 9e conférence internationale sur les traceurs et les méthodes de traçage (BRGM,Orléans, France)