Vous avez dit « changement climatique » ?
Le terme « changement climatique » fait référence à tout changement dans le temps, qu’il soit dû à la variabilité naturelle ou aux activités humaines (définition du GIEC). Il correspond à une modification durable, de la décennie au million d’années, du climat global de la terre ou de ses divers climats régionaux.
Les prévisions climatiques pour le bassin de la Loire
D’après l’étude ICC-HYDROQUAL
- La température : le changement climatique, selon les prévisions établies en 2014, se traduirait sur l’ensemble du bassin de la Loire par un réchauffement, exprimé en moyenne annuelle, de l’ordre de 2 °C vers 2050, et de l’ordre de 2,8 °C vers 2100. Le réchauffement serait plus important en été pour atteindre près de 4 °C en août en fin de siècle. Ce réchauffement s’accompagnerait d’une augmentation de l’évapotranspiration potentielle.
- La pluviométrie : l’évolution des cumuls pluviométriques mensuels serait plus contrastée de manière spatiale et selon les saisons. On s’attend à une forte diminution en été/automne, mais aussi à de légères augmentations au printemps. Sur la partie aval du bassin, les modifications seraient moins marquées.
Quel impact potentiel pour les nappes souterraines ?
La situation des eaux souterraines est très contrastée et dépend du caractère libre ou captif des nappes (cf. rubrique quantité). Les nappes libres des plateaux (calcaires du Jurassique supérieur, craie du Séno-turonien, ou calcaires de Beauce) seront plus sensibles à la diminution de la recharge. Les nappes profondes et captives, sans relation avec un cours d’eau, seront moins impactées, ou plutôt elles le seront moins rapidement.
L’impact a été évalué par des études utilisant des modèles de simulation mathématique. A l’échelle de la France, les ressources en eau souterraine, c’est-à-dire la quantité d’eau disponible dans les aquifères, devraient diminuer sensiblement à l’horizon 2070. D’après l’étude EXPLORE 2070, l’évolution des ressources disponibles est estimée entre +10% et -30% selon les scénarios optimistes, et entre -20% et -55% selon les scénarios pessimistes. Dans le bassin de la Loire, les niveaux piézométriques minimum baisseraient, suivant les secteurs, de -0,25 m (vallées) jusqu’à -8,5 m (plateaux), avec une moyenne de -1,8 m.
- Exemple de scénarios d’évolution prévisionnelle d’une nappe libre, à proximité de Tours (Modélisation EROS)
Cette diminution entrainerait une baisse du même ordre de grandeur des débits d’étiage des cours d’eau, puisqu’ils dépendent très fortement de l’alimentation issue des nappes en période d’étiage !
D’ailleurs, pour les débits des cours d’eau, les modèles ont permis d’estimer les effets potentiels en période d’étiage. Dans le cadre d’un projet mené dans les bassins de la Seine et de la Somme, nommé RExHySS, une baisse des débits pouvant atteindre près de 50 % a été estimée en périphérie de la Beauce.
Cela est illustré par la carte suivante pour les secteurs du Pithiverais et du Montargois. Les valeurs relatives d’évolution de débit (QMNA5) en noir précisent l’effet direct lié à la seule diminution de la recharge et les valeurs en rouge prennent également en compte les prélèvements agricoles.
Y-a-t’il déjà des signes de changement ?
L’existence ou non d’un impact du changement climatique sur les eaux souterraines est actuellement mal connu en France !
Afin de tenter d’apporter des premiers éléments, une étude BRGM de l’évolution des niveaux piézométriques sur des chroniques de longue durée a été réalisée en 2011 : une analyse statistique des niveaux d’eau souterraine en France a été réalisée sur une sélection de 375 piézomètres , dont la période de suivi est supérieure à 30 ans. Il est à noter que cette étude a permis d’identifier des tendances, mais elle ne porte pas d’appréciation sur une influence actuelle avérée ou non du changement climatique. Les résultats indiquent une tendance à la baisse des niveaux des nappes pour 54 % des piézomètres , à la hausse pour 29 % et à la stabilité pour 17 %. La répartition géographique de ces tendances présente une forte hétérogénéité.
NB : une baisse du niveau piézométrique peut s’expliquer par une baisse des précipitations efficaces potentiellement induite par un changement climatique, mais elle peut s’expliquer également par une augmentation des prélèvements par les forages.
Afin d’évaluer et de suivre l’impact du changement climatique sur les nappes, la désignation d’un réseau piézométrique de référence dédié est prévu en 2015. Il s’agit de protéger quelques ouvrages choisis, pour assurer un suivi à très long terme.
Pistes de réflexion pour une adaptation au changement climatique
Des mesures de gestion ont d’ores et déjà été mises en place pour certaines nappes faisant l’objet d’une surexploitation (cf. rubrique quantité). Elles devront être poursuivies et sans doute étendues à d’autres secteurs. Des restrictions plus fortes seront certainement nécessaires à l’avenir, et elles devront être anticipées par de nouvelles études intégrant une approche socio-économique.
A la baisse quasi-générale de la recharge en eau et à la diminution du débit moyen des cours d’eau, il va être indispensable de s’adapter pour une meilleure utilisation de l’eau tout au long de son cycle.
Parmi les pistes d’action, on peut citer l’amélioration de la rétention de l’eau dans les sols (augmentation du couvert végétal, création de haies), la lutte contre les gaspillages, l’amélioration des rendements des réseaux, le choix de techniques d’irrigation plus efficaces, la réhabilitation de zones humides, etc.
La gestion active de la ressource en eau souterraine fait également partie des pistes de travail pour optimiser la gestion de la ressource (stockage en aquifère , recharge artificielle).